Caprotti à Villata

"Brève, mais significative rencontre avec le propriétaire de la grande partie de  Villata.

Plage de Villata, auprès du Bar de la plage, désormais fermé. Le 28 Juillet, vers 11h30. Caprotti est accompagné d'un groupe de personnes, l'une d'entre elles a une carte en main.

Je réussis à comprendre, un peu grâce au français un peu grâce à l'anglais, que Caprotti définit la zone allant jusqu'aux rochers rouge comme "the Jungle, the Jungle".

À ma question, Caprotti se retourne. On se présente et on se tend la main. Sa main droite est bandée, elle semble être plâtrée et il tient un appareil photo numérique. Il me tend alors la main gauche et s'excuse : "J'ai la main cassée", explique-t-il. Je souris et dis que de toute façon je tiens moi aussi mon appareil photo de la main gauche. Il me regarde l'air interrogatif. En gros : "Qu'est-ce qu'il veut?"

Voilà je ne dialogue pas je lui dis simplement ce qui suit(mot pour mot):

"Je voulais connaître l'heureux et le chanceux propriétaire d'un endroit aussi beau." Je le dis en souriant. Je cherche à établir, en somme, un rapport non conflictuel.

"Aucune chance. Heureux? Pendant quarante ans je l'ai pris dans le cul et je n'ai  eu que des ennuis et des dépenses. Buongiorno." Il se retourne et s'éloigne. "Heureux.... Enjoyed... " Il ironise.

Une personne ayant assisté à la scène a par la suite entendu le nom de Renzo Piano, le célèbre architecte.

L'attitude de Caprotti, sans être impolie, était néanmoins brusque. Son désir de ne pas parler avec les habitués de la plage était évident.

Ce qui semble evident c'est que le Monsieur Caprotti a décidé de s'occuper de Villata, lui même.

Il maintient une ouverture qui permet l'utilisation de la servitude du passage allant du camping des Agostini jusqu'à la plage. Ce mur qui n'est  cependant pas une des limites de la propriété de Caprotti puisqu'il coupe le vieux parking , en semblant laisser une certaine partie du terrain aux  Agostini. (Pourquoi ? on ne sait pas, tout ce qu'on peut penser n'est que pure invention).

Le deuxième point important c'est que la visite en personne de Caprotti avec des ouvriers montre sa volonté de faire vite. Le nom de Renzo Plan, extrait du  contexte, peut signifier soit qu'il veut une grande oeuvre architecturale (il n'est pas sûr qu'il puisse la contempler , en admettant qu'il puisse la construire), soit qu'il ne veut pas avoir une oeuvre de Renzo Piano, mais une chose petite, en règle avec la loi, qu'il puisse utiliser comme bon lui semble.

Le troisième point est qu'il ne veut pas parler avec des étrangers de ce qu'il veut faire, parce qu'il ne veut pas nouveaux ennuis et que son attitude n'est pas celle de quelqu'un qui a gagné mais est celle de quelqu'un qui a perdu un bien qui était le sien. Ces 40 années d'"enjoy the jungle" il ne les pourra jamais les récupérer. Tous ces gens sur la plage, par contre, ont eu et ont ce qui lui revenait (et qu'il lui a définitivement été reconnu par un tribunal français) et dont il n'a pu jouir. ce qui explique son langage, peu gentleman mais certainement très sincère.À l'oral il a confirmé le sens de la lettre qu'il avait envoyée à Giovanni Erra, il y a un an et demi, mais avec une grande exaspération : le temps a accentué sa rage.

Le 7 octobre il aura 82 ans. Il est maigre, le visage tiré, ce qui diffère des photos officielles qui le présentent, mais il est d'un point de vue psychologique en pleine forme, son envie de combattre parait inébranlable. En lui souhaitant, naturellement, longue et belle vie, on peut tout de même essayer de comprendre son état d'esprit. Maintenant, il a pressé le pied sur l'accélérateur pour pouvoir jouir de sa "jungle". Mon opinion est que nous ne devons pas nous attendre, nous usagers de la plage, à un traitement de faveur : nous sommes, à ses yeux, peut-être,  ceux qui ont joui à sa place de la beauté de Villata. Au contraire, nous avons même cet été pu jouir de ce lieu exceptionnel qu'est Villata. Pour l'an prochain nous aurons sans autre des nouveautés, mais probablement nous réussirons encore   à rejoindre la plage.

Ensuite..... "

Fausto S.